Akaktus est morte. Merde ! Je soupire en m’affalant dans mon siège d’ordinateur trop douloureux pour le dos, me sentant plus la circulation de mon sang au niveau de mes fessiers. Fermant les yeux en soupirant de découragement avant de me tenir le ventre dû à mon estomac qui gargouille. Décidément, je vais réapparaître au début de cette mission et tout refaire à zéro, je n’ai plus de potions, rien. Je regarde l’heure et je soupire une énième fois. Les heures de jeux étaient officiellement terminées pour moi, ce soir, jusqu’à une prochaine fois. Au beau milieu de la nuit, j’ai sauté le repas sachant que j’étais concentrée sur mon écran. Trop focussée à maintenir la touche w enfoncé pour avancer ainsi qu’à récupérer des objets rares dans des endroits les plus reculés du jeu avec des potes de jeux. Je passe réellement trop mon temps dans des jeux comme celui-ci et quand ce n’est pas dans le jeu, mais c’est sur internet. Aucune vie sociable, je pourrais dire, c’est un peu le cas, disons que cela reste dans le virtuel, mais dans le réel ? J’aimerais éviter. J’aimerais être mon avatar dans ce jeu. J’aimerais être celle qui est courageuse, qui n’a pas froid aux yeux, qui parle à tout le monde comme si rien ne lui dérangeait. Non, il faut que je bug littéralement et que je sois un peu plus timide. Blasée par moment comme devant le pc, mais je reste néanmoins quelqu’un de solitaire qui ne se mélange pas à la foule.

Toute petite, on me surnommait la rondeur ou bouboule. On finissait par toujours croire leur insulte, n’est-ce pas ? Je me vois à la petite école me pointer littéralement du doigt en me disant que j’étais grosse. Et du moins, je me souviens des rires méchants, des poussées sur le sol. Victime d’intimidation dès le plus jeune âge. C’était devenu de pire en pire avec le temps. Me taisant, ne pleurant que la nuit ou bien cacher à la vue de tous. Encaissant de plus belle sachant que mes parents vivaient dans la misère surtout avec mon petit frère dans les parages. J’avais déjà pensé de disparaître à cette époque. J’avais déjà pensé de quitter car en quittant je ne ferai plus de peine à personne et je ne dérangerai personne. Pourtant, en tenant la petite main de mon petit frère, je sentais la force qu’il m’offrait. Qu’il me faisait confiance et qu’il avait besoin de moi. Alors moi, avec mes joues joufflues, je tenterai de combattre. Il fallait que je trouve une source d’inspiration pour combattre ma vie, car je baissais rapidement les bras. Pourquoi ? Malgré ma rondeur ça n’empêchait pas aux autres enfants de vouloir interagir de manière méchante à mon égard sachant que j’étais différente. Pourquoi la différence fait peur ? Pourquoi la différence mérite uniquement que des représailles ? Un monde de paix, un monde sans jugement, un monde sans de haine inutile. Existe-t-il un monde comme celui-ci quelque part ?

Dès le collège, j’avais littéralement changé. Me disant que personne ne m’apprécie comme je suis, je pourrais peut-être me faire passer pour quelqu’un d’autre, non ? Mangeant le moins possible pour perdre du poids, prétendre être une autre alors que je ne le suis pas. Me tenir avec des personnes populaires pour enfin me sentir un peu plus apprécier. Tentant d’étouffer les sentiments que je ressentais de nulle-part, mais aussi de me taire moi. Jusqu’à temps que je craque. Assise dans l’herbe en regardant les étoiles. Je me demandais où était mon identité. Je me demandais qui je suis réellement. Portant des vêtements que je détestais, aimant ce que je n’aimais pas dans le fond. Tout ce que les autres appréciaient, ce n’était qu’une corvée pour moi. Les astres qui brillent dans le ciel sombre qui restaient sagement muettes. Illuminant l’obscurité de nos nuits rendant le moment nostalgique ou bien triste, dans ce cas-ci. Un mal-être profond se situe en moi, a germé depuis bien des années. Le silence était ma consolation et je souffrais en silence. Le monde a bien plus de gérer dont éviter des guerres, mais personnellement, j’avais une crise d’identitaire. Typique d’une jeune adolescente qui ne savait plus du tout qui elle était réellement. Me refaire à zéro, retrouver ce que j’aime et je n’aimais pas. Au pire, je perdrais les amies que j’avais acquis avec mon “non-moi”. Je m’en fichais, je ne me sentais pas bien au fond de moi et non plus en compagnie des autres dont mon petit frère et ma petite sœur nouvellement conçue. Il fallait que je trouve une solution sinon j’allais disparaître à tout jamais. Toutefois, quelque chose captivait mon attention lors de cette nuit de ma crise identitaire près de cet arbre. Une maison était non loin et des rideaux étaient ouverts. La lumière qui jaillissait de cette chambre... Un jeu ? Jeu vidéo ? Que ce monde semble intéressant et envoutant. Malheureusement, il va rester hors d’atteinte.

Bouboule, s’écriaient-ils. Me retrouvant dans le corridor du lycée voilà que mes anciens assaillants frappaient de nouveau. Je faisais pourtant des exercices pour me maintenir en forme, mangeant le plus sainement possible, mais c’est vrai que j’avais la manie de tout grignoter sachant que je suis une gourmande. Sauf que, même si j’étais en forme, ça n’empêchait pas les mecs de mon âge de vouloir me “taquiner” à leur façon. Et je m’étais habituée, évoluer désormais en crainte. Les nanas qui me donnaient des claques en arrière de la tête dès que j’étais sur le chemin. Me coupant mon uniforme que je cousais à la fin de la journée pour ne pas que mère, étonnamment j’étais très habile. Malgré la torture que je subissais durant la journée à l’école, j’allais travailler avec ma mère dans un salon de coiffure. Habile avec les ciseaux, me ramassant un peu plus d’argent dans les poches, mais aussi aidant la maisonnée car à cinq ce n’étaient pas évident. Partageant ma chambre avec la plus jeune, l’aidant pour l’école même si mes notes étaient en baisse. Je voulais travailler, quitter le royaume des études, qui étaient pour moi un enfer. De toute façon, je n’étais pas comme les autres désirant absolument être médecin, policier, avocat ou autre dès le lycée terminé. Tout ce que je voulais c’était d’aider. Aider le plus possible ma famille... malgré que j’avais l’audace de m’acheter un ordinateur et d’apprendre ce que c’était un jeu. Aider, mais l’obsession de découvrir et de m’échapper de la vie réelle pour aller dans le virtuel était plus fort. Prendre un pseudo qui m’avait complètement sorti de mon esprit. Bouboule... un cactus pouvait être en forme de boule, avec des épines. A cactus, en anglais. Si on changeait les c pour mettre des K ? Akaktus, voilà. A, pour ainsi dire mon prénom, mais pour désigner qu’il n’y a qu’un seul cactus. Piquant, horrible à l’extérieur, mais il cache des merveilles à l’intérieur, car vous savez que de l’eau de cactus a des bienfaits pour notre peau, mais également hydrate lorsque nous sommes déshydratés ? Cependant, il n’aurait pas fallu que je puisse toucher au monde virtuel, il aurait fallu que je reste attentive, au point de me retrouver vêtu de noir devant une photo de notre père. Commémorer sa mort. Mort d’une maladie... Le regret s’était rapidement mis en m’envahir, pourquoi il fallait que ma vie soit aussi merdique ? Parmi l’intimidation à l’école et la mortalité, je voulais vraiment trouver une échappatoire. Tout ce que je trouvais était le fictif, cacher ma peine, cacher mes joies que je pouvais ressentir, me renfermer dans un monde totalement imaginaire.
Le diplôme. Enfin. C'était le mot qui m’était venu à l’esprit lorsque j’avais reçu mon diplôme. Le papier dans les mains, j’étais enfin contente de pouvoir déguerpir. La cérémonie était interminable, mais j’étais pour une fois contente et fière de moi que je puisse terminée quelque chose par moi-même. La fierté d’accomplir quelque chose était si satisfaisant, me disant que j’étais capable d’aller bien plus loin dans les études. Sauf que j’étais uniquement habile de mes mains et nulle dans bien des matières. Alors, je coupais des cheveux, et je coupe toujours des cheveux. En reniflant les pellicules de beaucoup trop de client, créant de belles têtes tout comme en essayant de faire des miracles à d’autres. Colorant, coupant, lissant, frisant. Me faisant snober par des gosses de riches qui ne savent même pas travailler convenablement à la sueur de leur front ou en écoutant des potins croustillants, comme quoi qu’un tel aurait couché avec une telle. Ou bien un tel aurait été dans des films pornos et il aurait été vu par un tel. Ou qu’une personne puisse s’introduire chez les gens pour faire leur ménage. Sur ce dernier potin, je l’ai ri avant de me gratter la gorge et de continuer la coupe.

Bing ! Toujours affalée sur ma chaise d’ordinateur inconfortable, je reçois un message de la part d’un/une ami/e. Je lui avais écrit que j’allais manger un morceau et dormir quelques heures. En gros que j’arrêtais de jouer. En me levant, je m’étire de tout mon être, je fais un pas avant de trébucher dans mon lit dans la noirceur. Quelle vie ennuyeuse que j’ai.