Ton prénom, c'est Kim Soo Hee. Pourtant, depuis que tu es toute petite, on t'a toujours appelé mademoiselle. Mademoiselle Kim, à la rigueur. Les seuls qui avaient le droit de prononcer ton prénom, c'étaient tes parents. Malheureusement pour toi, ils n'étaient pas souvent présents dans l'immense villa qu'était ton logement. Le seul vrai moment où ils avaient dû passer plus d'une heure en ta présence, était le jour de ta naissance, sans aucun doute.

Du haut de tes cinq ans, tu demandais souvent à la personne qui te gardait pourquoi il n'était pas là. Pourquoi quand tu fêtais ton anniversaire, il ne t'envoyait qu'un cadeau hors de prix mais qu'eux, ne franchissait pas la porte de la maison. Pourtant tu attendais, devant la grande porte. Tu étais assise, les yeux rivés dessus dans l'espoir qu'elle s'ouvre. Mais ça n'arrivait jamais et plus les jours passaient, plus tu perdais espoir d'un jour les voir s'occuper de toi.

C'est sûrement par rancune, par désir d'être plus souvent en leur présence que tu décidas d'agir comme une enfant capricieuse et pourrie gâtée. Tu faisais des scandales pour tout et pour rien, mais à six ans, on te les passait facilement. Ta bouille adorable te faisait avoir tout ce que tu souhaitais et ce, par n'importe qui. Tu te retrouvas ainsi avec deux chiens adorables et fidèles mais aussi couvertes de cadeaux, plus coûteux les uns que les autres. Cela te rendit sûrement capricieuse, égoïste et prétentieuse mais tu t'en fichais et réclamais toujours plus. Tu pouvais te le permettre après tout.

Mais rien ne changeait, malgré tous tes caprices. Pourtant, le jour de tes dix ans, ta vie de princesse prit une nouvelle tournure. Tes parents te convoquaient dans le bureau de ton géniteur. Fébrile, tu avais traversé à toute vitesse votre demeure, dans les limites que t'autorisais la bienséance bien sûr, pour arriver devant la pièce. Tu avais frappé à la porte et attendu l'autorisation d'entrer. Dans ton cœur, tu espérais encore, en ce jour particulier pour toi. Tu espérais un sourire sur les lèvres de tes parents, un cadeau devant eux et des mots d'amour. C'est avec un sourire que tu étais entrée dans la pièce.

Ce sourire tu l'avais vite perdu devant le visage fermé et froid de tes géniteurs. Ils t'avaient demandé de t'asseoir sur l'immense fauteuil devant toi et, docile, tu avais obéi. Ils t'avaient parlé de ce qu'ils attendaient de toi, maintenant que tu sortais de l'enfance. Tu devrais apprendre les règles de bienséance, te comporter sans aucune faute dans la haute société, faire honneur à ton nom par ta culture. Ils t'avaient même choisi un nouveau précepteur pour remplir cette mission. Juste après ce déluge d'informations, ils t'avaient renvoyé dans ta chambre, sans te laisser leur adresser un seul mot.

Tu étais sortie de ce bureau en silence, la tête haute pour cacher ta souffrance. Mais dès que la porte avait claqué derrière toi, tu avais couru, couru aussi vite que te le permettait tes jambes et tu t'étais enfermée dans ta chambre. Ton reflet, que tu voyais dans l'immense miroir de la pièce, faisait pitié à voir. Tes larmes coulaient sans pouvoir s'arrêter sur tes joues. Tes yeux étaient rouges et gonflés. Tes poings serrée par la colère, l'incompréhension et la tristesse. Tu ne te reconnaissais pas.

Ce jour-là, tu pris la décision de devenir l'héritière parfaite qu'il souhaitait avoir. Tu filerais droit, tellement droit, qu'il ne pourrait jamais rien te reprocher. On ne voulait pas t'aimer . Tu n'aimerais personne, tu serais une poupée de glace. Arrogante, prétentieuse, hautaine, c'est ainsi que tu te présentas dès le lendemain. Tu rabaissais les gens dès que tu le pouvais, étalais ta richesse devant eux. On t'envia à partir de ce moment-là. Toi, tu te retranchas derrière cette façade, au point d'oublier celle que tu étais avant.

Le précepteur que tes parents t'avaient promis se présenta. Il était dur, intransigeant et horriblement froid. Il ne t'apprit pas seulement le coréen, l'histoire ou plusieurs autres langues. Il participa activement à ton éducation sur les règles régissant la haute société. Mais il t'apprit aussi ce qu'était le racisme, l'homophobie, le rejet de tout ce qui n'était pas comme toi. Deux hommes qui s'embrassait ? Impensable à tes yeux, ça te faisait vomir d'y penser ! Le pire pour toi, c'était ces légendes débiles qui courraient dans les rues de ta ville. Comme si des personnes avec des dons, ça existait. Comment pouvaient-ils seulement poser les pieds sur la terre où tu vivais ? Il n'en avait pas le droit, ils n'étaient que des sous êtres.

Plus tu grandissais, plus tu t'enfonçais dans les délires de cet homme, y croyant dur comme fer, faisant la fierté de tes parents par tes résultats. Tu étais aimée peu importe où tu allais dans ce monde mondain et sans pitié. Mais c'était certainement parce que tu étais la reine des garces.

Seulement, tout changea l'année de tes dix-sept ans. Cette nuit-là, tu fis un horrible cauchemar qui t'avait semblé tellement réel que tu en étais sortie tremblotante et terrorisée. Tu avais vu un accident de voiture, dans lequel ta génitrice mourrait, alors que vous vous rendiez à la soirée organisée par un ministre quelconque. Mais ce n'était qu'un rêve et malgré l'horreur qu'il avait provoqué chez toi, tu te rendormis bien vite.

Ta journée, à la suite de ce rêve, s'était déroulée comme toute les autres précédentes. Tu avais rabaissé plusieurs personnes pour des fautes de style, ce que tu ne supportais pas, la mode étant ta seule réelle passion, tu avais assuré avec brio tes cours et tu t'étais préparée en vue de la soirée à laquelle tu allais. Pourtant tu avais eu un flash-back de ce rêve avant de monter dans la voiture, un serrement au cœur. Mais tu les avais balayé d'un revers de la main pour monter dans l'immense limousine.

Tu tapais un article pour ton blog quand ça se passa. Tu te réveillas à l'hôpital, prêt de deux ans plus tard. Tu étais dans le coma après un accident dans lequel ta mère était décédée. Tu compris que ton rêve n'en avait pas été un. Le choc t'avait rendu muette, et si tous les médecins attribuait ça à la mort de celle qui t'avait donné la vie, tu savais que ce n'était pas vrai. Tu réfléchis toute la journée, avant de balayer les doutes qui avait saisi ton esprit d'un revers de la main. Ce n'était qu'une coïncidence, rien de plus. Tu n'étais pas un de ces monstres, un de c'est sous-êtres et tu le savais.

Tu sortis de l'hôpital après une lente rééducation, et tu repris ta vie comme si de rien n'était. Pourtant, de temps a autres, quand tu dormais ou quand tu étais éveillée, tu voyais des choses. Certaines se réalisaient, d'autres non. Mais tu refusais de voir la vérité en face, te cachant derrière ton mépris et ton dédain, te persuadant que tu n'étais pas une créature comme tous ses autres... monstres.

Ton père, après la perte de sa femme, fit en sorte de devenir plus doux avec toi. C'était trop tard, mais tu en profitais, gagnant le droit de faire ton école de stylisme après l'obtention de ton diplôme. La seule chose qu'il exigea de toi, ce fut de te marier avec ce Ryo Sun Min. Un riche héritier. Tu acceptas, sachant que jamais tu n'épouserais cet homme. Tu ne voulais enchaîner ta vie avec personne et très vite, pour montrer à cet homme qui croyait que tu étais sa propriété que ce n'était pas le cas, tu commenças à coucher à droite et à gauche. Pourtant il ne perdait pas pied et chacune de vos rencontres se soldaient par des joutes verbales où votre égocentrisme ressortait. Il te voyait comme sa poupée. Tu voulais être libre et indépendante et tu le lui prouvais.

Alors aujourd'hui, au milieu de cette ville dans laquelle tu as toujours vécue, tu vis dans un riche appartement entièrement payé par ton père. Tu suis un cursus de stylisme où tu excelles tout en tenant ton blog mode, qui est de plus en plus connu et suivit. Tu vis ta vie comme tu l'as toujours vécue mais une petite voix vient parfois résonner dans ta tête quand tu es seule dans ton grand lit : et si tu étais un de ces monstres que tu hais tant
et que ses visions étaient vraiment des visions du futur ? Devrais-tu aller dans cette école et tout abandonner ? Tu ne veux même pas l'envisager.